65 minutes de route pour atteindre les commerces : ce village est le plus isolé de France métropolitaine

«En voiture, on ne peut pas aller plus loin, c’est un cul-de-sac», nous explique un des habitants du village au téléphone, alors qu’on lui apprend que la commune où il habite depuis l’après-guerre est la plus isolée de France métropolitaine «par la route». Cette phrase résume à elle seule la situation géographique singulière de ce village isolé où chaque déplacement est un vrai périple.

Nous sommes en Corse. «En roulant normalement, il y a 1h15 de route jusqu’à l’entrée d’Ajaccio, et les premiers supermarchés Leclerc et Carrefour», raconte notre source, qui ne veut pas donner son nom, craignant de faire de la mauvaise publicité à son village. Une heure et quart pour atteindre le premier hypermarché : c’est donc le quotidien des habitants de cette commune éclatée en vingt-deux hameaux sur sept kilomètres. Pas de bus, pas de transport en commun. Bienvenue à Pastricciola, un lieu où décidément la voiture n’est pas un luxe, mais plutôt un bien essentiel de survie. Selon les données officielles (voir méthodologie), il faut 64,8 minutes pour rejoindre «un centre d’équipements et de services». En métropole, à part sur les îles bretonnes, on ne fait pas pire.

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Pour rallier le village, trois routes départementales sinueuses serpentent dans la montagne. La plus empruntée grimpe depuis Ajaccio, franchit le col de Tartavello à 885 mètres d’altitude avec des pentes qui atteignent 9,3%. Une heure et quart de virages serrés, de montées abruptes. Quel que soit l’itinéraire choisi, impossible d’échapper aux lacets qui s’accrochent à la montagne.

Si le village possède bien une épicerie ouverte toute l’année, «le prix y est forcément très élevé». Besoin d’un coiffeur ? Une heure de route jusqu’à Péri. Un médecin ? «Nous en avons un qui passe une fois par semaine, tous les vendredis». Des infirmières viennent également trois fois par semaine faire leur tournée du canton.

Envie d’un bain de mer ? Comptez une heure jusqu’à la plage de Sagone. Le GR20, fierté de la randonnée corse, passe à deux heures de marche du village, mais les touristes ne font pas de détour pour autant. «Il y a un monsieur qui a un gîte, il ne fait pas fortune». Les rares visiteurs ? «Ceux qui se perdent».

Le village compte aujourd’hui une soixantaine d’habitants en hiver. «J’ai connu le village à l’époque avec cinq bars, quatre écoles. Il y avait 1500 habitants dans les années 50». Quatre écoles dispersées dans les hameaux, des logements pour les instituteurs, une vie rurale qui battait son plein. Aujourd’hui, «il n’y a pas de bar», les écoles ont fermé depuis longtemps.

«Les gens qui ont des logements dans le village, ils habitent tous à Ajaccio, explique notre interlocuteur. On garde la maison familiale pour l’été, pour le 15 août quand tout le monde remonte pour la fête de l’Assomption , mais on vit en ville.» Bref, à Pastricciola, la route est un cordon ombilical fragile qui rattache encore quelques habitants à la vie des agglomérations.

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Les données proviennent du jeu de données «Temps d’accès routier moyen à un centre d’équipements et de services» (Observatoire du territoire).

Il s’agit de la commune la plus éloignée par rapport à un centre intermédiaire/structurant/majeur d’équipements et de services, c’est-à-dire un pôle urbain comprenant a minima une trentaine de commerces et services, «foyers d’activité du quotidien (offre de soin de premier recours complète, activité commerciale renforcée, etc.)». La classification a été réalisée pour l’étude "Centralités : comment les identifier et quels rôles dans les dynamiques locales et intercommunales ?"menée par l’INRAE-CESAER en partenariat avec l’ANCT.

Pour les besoins de cet article, nous n’avons pas comptabilisé les communes situées sur des îles en Bretagne en raison de leurs spécificités géographiques.