Un chirurgien français jugé pour avoir violé et abusé de 299 personnes
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VANNES, France -- Un ancien chirurgien doit être jugé lundi en France pour le viol et les abus sexuels présumés sur 299 victimes, la plupart d'entre elles étant des enfants qui étaient ses patients, dans ce que les enquêteurs et ses propres carnets décrivent comme une série de violences s'étalant sur plus de trois décennies.
Joël Le Scouarnec, aujourd'hui âgé de 74 ans, devra faire face à des centaines de victimes lors d'un procès de quatre mois à Vannes, en Bretagne. Il risque jusqu'à 20 ans de prison s'il est reconnu coupable, en plus des 15 ans qu'il purge depuis sa condamnation en 2020 pour viols et agressions sexuelles sur mineurs.
Il ne nie pas les faits, mais il dit ne pas se souvenir de tout. Certains survivants n'ont aucun souvenir des agressions, car ils étaient inconscients au moment des faits.
Le procès de Le Scouarnec intervient alors que des militants militent pour lever les tabous qui entourent depuis longtemps les abus sexuels en France. Le cas le plus marquant est celui de Gisèle Pélicot, qui a été droguée et violée par son ex-mari et des dizaines d'autres hommes, qui ont été reconnus coupables et condamnés en décembre à des peines de prison allant de trois à vingt ans.
Des associations de protection de l'enfance, de défense des droits des femmes et des associations du milieu médical ont appelé à un rassemblement lundi devant le palais de justice où sera jugé Le Scouarnec.
L'affaire a commencé en 2017, lorsqu'une voisine de 6 ans a déclaré que Le Scouarnec l'avait touchée par-dessus la clôture séparant leurs propriétés.
Une perquisition ultérieure à son domicile a permis de découvrir plus de 300 000 photos, 650 fichiers vidéo à caractère pédophile, zoophile et scatologique, ainsi que des carnets où il se décrivait comme pédophile et détaillait ses actions, selon les documents d'enquête.
En 2020, Le Scouarnec a été reconnu coupable de viol et d’agression sexuelle sur quatre enfants, dont deux nièces, et a été condamné à 15 ans de prison.
Il avait admis avoir commis des abus sur enfant entre 1985 et 1986, mais certains cas n'avaient pas pu être poursuivis en raison du délai de prescription.
Le procès de Vannes examinera des viols et autres sévices présumés commis entre 1989 et 2014 contre 158 hommes et 141 femmes, âgés en moyenne de 11 ans à l'époque.
Selon les documents d'enquête, le médecin a abusé sexuellement de garçons et de filles lorsqu'ils étaient seuls dans leur chambre d'hôpital.
« Je ne me souvenais pas vraiment de l'opération. Je me souvenais de l'après-opération, d'un chirurgien assez méchant », se souvient Amélie Lévêque, une des victimes, à propos de son séjour à l'hôpital en 1991, alors qu'elle avait 9 ans. « J'ai beaucoup pleuré. »
Des années plus tard, elle décrivit le sentiment d'effroi qu'elle éprouva lorsqu'elle apprit que son nom figurait dans les carnets de Le Scouarnec.
« C'était le début des réponses à toute une vie de questions, puis le début de la descente aux enfers », a-t-elle confié à la chaîne publique France 3. « J'avais l'impression d'avoir perdu le contrôle de tout. Je n'étais pas folle, mais maintenant, je devais affronter la vérité. »
« Je suis tombée dans une profonde dépression. Ma famille a essayé de m’aider, mais je me sentais complètement seule. »
L'Associated Press ne nomme pas les personnes qui disent avoir été agressées sexuellement, à moins qu'elles ne consentent à être identifiées ou décident de raconter leur histoire publiquement.
L'avocat de Le Scouarnec, Thibaut Kurzawa, a déclaré au journal Sud-Ouest que son client « répondrait aux questions des juges » car il a décidé « de faire face à la réalité ».
Le Scouarnec avait déjà été condamné en 2005 pour possession et importation de matériel pédopornographique et condamné à quatre mois de prison avec sursis. Malgré cette condamnation, il avait été nommé praticien hospitalier l'année suivante.
Certains groupes de protection de l'enfance se sont joints à la procédure en tant que parties civiles, affirmant qu'ils espéraient renforcer le cadre juridique pour prévenir de tels abus.
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Vaux-Montagny a réalisé ce reportage depuis Lyon, en France. Sylvie Corbet, journaliste à l'Associated Press à Paris, a contribué à ce reportage.
ABC News