Le défaitisme ne peut pas être une réponse à une démonstration brutale de pouvoir

Parfois, on a l'impression que rien ne peut l'arrêter. En 24 heures, les deux guerres qui ont profondément affecté l'Europe cette semaine ont attiré l'attention avec une escalade sensationnelle de la part de dirigeants qui se croient intouchables. Mardi après-midi, des avions israéliens ont tiré des missiles sur un bâtiment à Doha où des dirigeants du Hamas auraient discuté d'une nouvelle proposition de paix américaine. Le Qatar s'efforce depuis quelques années de se forger une réputation de refuge pour des négociations difficiles. Avec cette attaque, Israël a violé la souveraineté du Qatar et bafoué toutes les normes diplomatiques.
Par cette manœuvre, Israël a clairement indiqué une fois de plus qu'il n'était absolument pas intéressé par un accord avec le Hamas. Israël veut le rayer de la carte. Israël veut la capitulation, pas des accords. Il n'y a pas de processus de paix à Gaza ; il n'y a qu'un siège de Gaza.
Israël se comporte comme un combattant rebelle pour qui la fin justifie les moyens. Fort d'une armée de l'air supérieure et de nombreuses années d'expérience en matière d'assassinats à l'étranger, Israël tente de manipuler la dynamique de toute une région. Il accepte des relations difficiles avec les pays arabes dans le cadre de l'accord, espérant vraisemblablement œuvrer à une normalisation ultérieure, après Gaza.
Pour l'instant, le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahou s'en tire avec cette approche du tout ou rien grâce au soutien indéfectible des États-Unis. Le seul à pouvoir convaincre Netanyahou de modérer son attitude est le président Donald Trump, et il n'y parvient pas.
Trump et Netanyahou partagent un trait dangereux : Trump, lui aussi, se croit au-dessus des lois et des règles, et pense pouvoir tout faire impunément. Lui aussi agit selon l'adage attribué à Louis XIV : « L'État, c'est moi ». Washington devrait s'efforcer de mettre fin au génocide à Gaza, conformément au droit international. Au lieu de cela, la Maison-Blanche rêve d'un littoral commercialement attractif.
À peine remise de la dernière escalade israélienne, l'Europe s'est réveillée mercredi matin en apprenant que l'OTAN, pour la première fois depuis le début de la guerre de Poutine contre l'Ukraine, avait abattu des drones russes au-dessus de son territoire. Cette provocation de Poutine s'inscrit dans une longue série d'incidents et présente toutes les caractéristiques d'une attaque hybride : facilement démentie et pas assez grave pour contraindre l'ennemi à riposter. Les Russes ont rapidement nié son caractère intentionnel, mais il est peu probable qu'il s'agisse de drones errants, en réalité destinés à l'Ukraine. Une vingtaine de drones ont atteint la Pologne par deux voies différentes, plusieurs d'entre eux pénétrant assez profondément dans l'espace aérien polonais.
Vladimir Poutine est un autre homme qui, en envahissant un pays souverain, a prouvé son mépris des règles. Et lui aussi se comporte comme s'il était intouchable. Il a répondu à d'innombrables initiatives de paix ces derniers mois par des frappes de drones et de missiles contre des cibles civiles. En Ukraine aussi, malgré toutes les initiatives occidentales, il n'y a pas de processus de paix.
Le monde est ainsi fustigé par des hommes qui se croient intouchables – lors d'une visite en Chine, Poutine a même évoqué avec le président Xi Jinping la possibilité de vivre jusqu'à 150 ans grâce aux progrès de la médecine. Face à un pouvoir aussi incontrôlé, deux options s'offrent théoriquement à lui : le défaitisme, car il est impossible de faire face à un tel pouvoir et à un tel comportement intimidant ; ou la persévérance dans la lutte ardue pour le droit, la justice et la dignité humaine.
Les réactions à Doha et aux drones n'ont pas été particulièrement impressionnantes, mais elles ont aussi montré que tout le monde n'a pas encore accepté que le seul droit est celui du plus fort. Le Conseil de sécurité de l'ONU, quasiment incapable d'agir ces dernières années, a condamné l'attaque israélienne contre Doha. Les États-Unis n'ont pas utilisé leur veto pour protéger Israël cette fois-ci. Israël n'avait pas non plus grand-chose à craindre de l'Europe jusqu'à présent. L'UE est divisée, et seuls quelques pays – l'Espagne et l'Irlande – prennent des mesures sérieuses. La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a finalement appelé cette semaine à un embargo commercial partiel. Elle spécule peut-être sur l'impossibilité pour les États membres de parvenir à un accord, mais c'est déjà un début. Il reste inacceptable que l'Europe ne prenne pas de mesures plus fermes contre un pays ami qui mène une guerre génocidaire.
En réponse aux drones, plusieurs pays européens, dont les Pays-Bas, ont convoqué l'ambassadeur russe. La provocation des drones constitue un test politique pour l'Alliance, qui a mis du temps à formuler une réponse collective. Une réponse politique forte de l'OTAN est essentielle. Si cette réponse n'est pas immédiate, la prochaine provocation ne tardera pas à arriver.
Pour que l'OTAN réponde de manière convaincante, Trump devra toutefois se ranger du côté des Européens. Sa première réaction fut timide et manifestement pro-Poutine : « C'est peut-être une erreur, pensa-t-il. »
Quiconque se soucie du sort des Palestiniens et d'une Ukraine souveraine, qui se soucie d'une Europe indépendante et démocratique et d'un ordre international où les règles assurent la stabilité des petits pays, ne peut se permettre le luxe du défaitisme. Et l'invulnérabilité n'est jamais éternelle. Il suffit de demander à l'ancien dictateur syrien Bachar el-Assad, contraint de quitter le pouvoir à la fin de l'année dernière, ou à Jair Bolsonaro, ancien président du Brésil, condamné cette semaine à 27 ans de prison pour tentative de coup d'État.
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