Le journalisme sur les réseaux sociaux pour transmettre l'actualité aux jeunes
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La plus jeune équipe éditoriale des Pays-Bas : voilà ce que promet SPIL*, la plateforme d'information jeunesse récemment lancée. L'équipe éditoriale, composée de moins de trente ans, annonce avec enthousiasme ses projets de vidéos lors de ce lancement modeste dans un restaurant d'Amsterdam, comme une semaine sans produits américains et des interviews de politiciens au Binnenhof. L'équipe éditoriale est impatiente de découvrir ce qui manque aux participants en matière d'information destinée aux jeunes. « Comment cela fonctionne-t-il au sein de votre équipe éditoriale ? », demande-t-on à la presse présente.
SPIL* a été officiellement lancé cette semaine par l'entreprise belge Mediahuis, acteur majeur du secteur médiatique néerlandais avec des journaux comme De Telegraaf et NRC et des stations de radio comme Radio Veronica et SLAM!. La nouvelle plateforme permettra non seulement de produire des vidéos pour TikTok, Instagram et YouTube, mais aussi de diffuser des podcasts. L'objectif est de toucher les jeunes, une cible difficile pour les médias d'information traditionnels. Une étude de SPIL* révèle une pauvreté médiatique chez les jeunes. Plus de la moitié des 15-25 ans indiquent vouloir être mieux informés sur l'actualité.
L'urgence a été une nouvelle fois soulignée cette semaine par le rapport Reuters Digital News , qui avertissait que l'intérêt, l'utilisation et la confiance envers l'information déclinaient chez les jeunes. Si le rapport 2024 indiquait déjà que près de 80 % des jeunes utilisaient les réseaux sociaux pour suivre l'actualité, il apparaît désormais que la consommation médiatique chez les jeunes ne s'améliore pas avec l'âge. L'Autorité néerlandaise des médias avertit que les géants du numérique deviennent les gardiens de l'information, ce qui réduit le contrôle des institutions journalistiques traditionnelles. Elle appelle donc les médias à rechercher des moyens de développer des informations sous des formes qui plaisent à toutes les générations.
SPIL* est l'une des initiatives développées ces dernières années pour intéresser davantage les jeunes à l'actualité. En 2023, la Fondation pour la démocratie et les médias a soutenu la chaîne de médias sociaux Snackpaper, qui souhaitait rendre les journaux plus accessibles aux jeunes. NOS Stories, qui publie de courtes vidéos d'actualité et compte 1,2 million d'abonnés sur Instagram, en est un autre exemple. Cestmocro, qui ne fait pas partie d'un média établi, est également une source d'information importante pour de nombreux jeunes. « Les jeunes s'informent souvent via les réseaux sociaux », confirme Sophie Kluivers, rédactrice en chef de SPIL*. « De nombreux médias ne les proposent tout simplement pas sous une forme qui les intéresse. »
Fourniture d'informations manipuléesIrene Costera Meijer, professeure de journalisme à la Vrije Universiteit d'Amsterdam, spécialisée dans l'information jeunesse, souligne le glissement de la consommation d'informations vers les médias sociaux. « Comme les jeunes reçoivent toutes sortes d'informations via les médias sociaux, ils se croient bien informés. Mais les médias sociaux manquent souvent d'explications et de contexte. De plus, les algorithmes des médias sociaux ne sont pas conçus pour l'information, car le divertissement et l'extrémisme priment sur les faits concrets. Par conséquent, l'offre d'informations est facilement manipulée, sans que les jeunes s'en rendent compte. »
C'est pourquoi les médias d'information traditionnels devraient prendre leurs responsabilités et séduire les jeunes avec de nouvelles formes de narration, selon Costera Meijer. « Les jeunes font encore confiance aux journaux, mais ils ne les lisent pas. Les journaux devraient en profiter pour les attirer. Ils devraient réfléchir à de nouvelles façons de présenter l'information : avec des images, un langage compréhensible et une présentation personnalisée. »
Costera Meijer ne voit que peu de marques d'information qui y parviennent. « NOSStories a été l'une des premières et a acquis une excellente réputation dans son domaine, ce qui explique sa popularité. Mais Cestmocro sait aussi séduire les jeunes à sa manière. Ces médias leur donnent le sentiment que l'actualité est faite pour eux. Les sujets abordés correspondent à leur univers et ils se sentent intégrés à leur public cible. »
SPIL* n'a pas encore construit d'audience permanente et doit d'abord faire ses preuves. Sophie Kluivers explique que la plateforme souhaite se démarquer en testant de nouveaux formats vidéo, inspirés des tendances des réseaux sociaux. « Nos rédacteurs présentent l'actualité de manière personnalisée et adoptent un style vlog », précise-t-elle. Ce sont des formats narratifs également populaires ailleurs, copiés sur les influenceurs. « Sur les réseaux sociaux, il est essentiel d'adopter une stratégie audio et vidéo. Cela correspond non seulement à l'algorithme, mais aussi au comportement médiatique des jeunes. »
De plus, SPIL* s'engage pleinement en faveur de la transparence journalistique. « La confiance dans les médias est faible et nous souhaitons y remédier en impliquant le téléspectateur », explique Kluivers. « Nous cherchons des moyens d'impliquer les jeunes sur la plateforme. Nous ne souhaitons pas nous contenter de diffuser l'actualité, mais impliquer notre public cible dans nos reportages. Nous y attachons une grande importance. Nous interrogeons les jeunes sur leur quotidien et soulignons l'importance des sujets qui les concernent personnellement. »
Midi dixSPIL* s'inscrit dans la lignée de Snackpaper, qui a permis de rapprocher le journalisme de presse écrite des jeunes en synthétisant des articles de fond et des textes longs sous forme audiovisuelle. Sa fondatrice, Janna Nieuwenhuijzen, était initialement journaliste à Het Parool (filiale de DPG Media), mais elle a dû faire face au manque d'intérêt des médias traditionnels pour les jeunes. « Il est midi dix pour les médias traditionnels : il existe un décalage entre la consommation d'informations par les lecteurs et l'offre d'informations des journaux. Avec Snackpaper, j'ai tenté de créer un pont. »
Snackpaper n'était actif que sur Instagram et TikTok, où les jeunes passent le plus clair de leur temps. Cependant, Nieuwenhuijzen ne souhaite pas que les réseaux sociaux deviennent les nouvelles plateformes d'information, car cela se ferait au détriment du journalisme. « Nous devrions principalement utiliser les réseaux sociaux pour toucher le public. La diffusion d'informations via les réseaux sociaux n'est pas souhaitable : elle manque de nuances. Il faut s'adresser au public et l'orienter ensuite vers les plateformes où le journalisme peut s'exprimer pleinement, par exemple les applications des journaux. »
Nieuwenhuijzen a compris que Snackpaper ne résolvait pas le problème et la plateforme est désormais inactive. « Snackpaper était une vaste expérience pour voir si du journalisme de qualité pouvait être présenté sous forme de contenu pour les réseaux sociaux. Mais je ne voulais pas concurrencer les médias traditionnels. » Selon Nieuwenhuijzen, il est plus important de bouleverser les médias traditionnels. « Snackpaper m'a fait comprendre que le changement doit venir de l'intérieur. Nous devons consolider les fondements des médias traditionnels, non seulement parce que c'est leur responsabilité, mais aussi parce que, sinon, les institutions journalistiques risquent de disparaître. »
Initiatives des médias établisCette prise de conscience a également gagné les médias d'information établis. Nieuwenhuijzen s'est fait connaître avec Snackpaper et a récemment occupé le poste de « Directeur des Publics Futurs » chez DPG Media. « Chez DPG, nous développons une stratégie à long terme pour établir une relation durable avec de nouveaux publics, notamment les jeunes. Je suis heureux que l'urgence soit désormais reconnue. »
Tandis que Mediahuis tente de séduire les jeunes avec la nouvelle initiative SPIL*, DPG s'attaque au problème en interne. « Nous voulons ramener les jeunes aux médias traditionnels, mais sous des formes adaptées à leurs besoins. »
D'autres journaux cherchent également de nouvelles façons de toucher les jeunes. Par exemple, NRC a mis en place ce printemps une équipe éditoriale vidéo, chargée de traduire les articles des rédacteurs en vidéos pour les réseaux sociaux. « Nous cherchons à toucher un public qui n'est pas naturellement enclin à lire un journal », explique Patricia Veldhuis, rédactrice en chef. « C'est nouveau pour nous. NOS est déjà habitué à travailler avec des images, et nous nous y habituons rapidement. Avec les vidéos sur Instagram et TikTok, nous cherchons à faire découvrir le journalisme de NRC aux jeunes, tout comme de nombreux nouveaux abonnés nous ont découvert ces dernières années grâce à nos podcasts, comme « NRC Vandaag ». »
Malgré les menaces que représentent les réseaux sociaux pour le modèle de revenus des journaux, Veldhuis estime nécessaire de proposer des informations sous cette forme. « C'est gratuit, mais c'est un investissement à long terme. Afin de continuer à remplir notre devoir journalistique, nous souhaitons impliquer les jeunes dans l'actualité mondiale et ses implications. Nous voulons les tenir informés et leur donner un point de repère, quelle que soit la forme. »
Costera Meijer ne perçoit pas encore l'ambition des entreprises de médias dans leur approche. « Les journaux, en particulier, sont à la traîne. Un changement culturel est absolument nécessaire, et c'est difficile. Ils n'y investissent pas toute leur énergie. » De petites équipes éditoriales pour les médias sociaux, composées de spécialistes de la communication, ne mèneront pas ce changement. « Les journalistes les plus expérimentés, les meilleurs narrateurs, devraient être présents », déclare Costera Meijer, professeur à l'UvA. « Ils savent comment transformer des histoires complexes et captiver l'attention. Même si cela doit se faire sur un TikTok de 60 secondes. C'est le seul moyen d'attirer l'attention des jeunes, sans pour autant compromettre la profondeur. »
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