Atteint du cancer, il parvient à le faire reconnaître comme maladie professionnelle

Après huit ans de combat, un ex-employé des chemins de fer d’ArcelorMittal et de QNSL sur la Côte-Nord est parvenu à faire reconnaître que le cancer incurable dont il souffre depuis 2017 a été causé par son travail.
Aujourd’hui âgé de 57 ans, Dario Mignault vit entre Port-Cartier et Kamouraska, au rythme des examens, protocoles et traitements qui l’obligent, plusieurs fois par mois, à recourir aux services d’oncologie de la région de Québec.
«Tu te fais une vie, des projets. Tu travailles en conséquence. Et juste avant de prendre ta retraite, du jour au lendemain, tout est chamboulé. C’est vraiment difficile. Pour moi, mais aussi pour ma femme et ma fille. C’est un changement de vie complet que je ne souhaite vraiment à personne.»
À l’époque, lors d’un examen de routine, M. Mignault apprend qu’il est atteint d’un rare cancer, un lymphome lymphoplasmocytaire de type Waldenström. Étrangement, quelques jours plus tôt, un ex-collègue lui avait appris qu’il était aussi atteint d’un cancer semblable.
«Quand je suis retourné le voir pour lui raconter ça, il y a eu comme un grand silence... Ça ne se pouvait pas qu’on se retrouve tous les deux avec cette même maladie. Il fallait que ce soit à cause du travail.»
Ce travail, celui de conducteur-électromécanicien de meuleuse de rail, était celui que M. Mignault pratiquait depuis l’âge de 21 ans. Essentiellement, ces équipes avaient pour tâche de voir à l’entretien des quelque 420 km de voies ferrées qui séparent Port-Cartier, sur la Côte-Nord, du village minier de Fermont, à la frontière du Labrador.
Or, ce travail les oblige à régulièrement éteindre des incendies provoqués par l’effet de friction entre les rails et la machinerie utilisée. La fumée et les vapeurs nocives respirées pendant ces événements seraient, selon les oncologues consultés à l’époque, à la source du développement de ce type de cancer, déjà connu des pompiers.
Un combatS’entame alors, avec le contentieux du syndicat des Métallos, un combat devant la Commission de la santé et sécurité du travail (CSST) et le Tribunal administratif du travail (TAT). Une bataille épique, ponctuée de témoignages, d’expertises médicales et de contestations en tout genre de l’employeur.
Cinq ans plus tard, un juge du TAT a finalement renversé le dernier recours d’ArcelorMittal et a reconnu officiellement le cancer de M. Mignault comme maladie professionnelle.
«Bien sûr que je suis content. Cela même si, personnellement, ça ne changera rien pour moi. J’ai le cancer. Il demeure incurable. Et j’ai déjà dépassé l'espérance de vie que l'on m'accordait. Mais pour les travailleurs qui me suivront, je suis content. On sait maintenant que, comme pour les pompiers, ils doivent disposer d'équipements adéquats pour se protéger.»
Aujourd’hui, même si la CSST lui cause des difficultés en multipliant les obstacles aux remboursements de ses dépenses, Dario Mignault tâche de vivre le plus normalement possible, en respectant la promesse qu’il a faite à sa fille dès le départ.
«Elle avait 7 ans à l’époque. Je ne lui ai rien caché. Je lui ai dit que je risquais de mourir, mais que j’allais tout faire pour passer au travers. Je ne peux pas te promettre que je vais survivre, lui ai-je dit. Mais je vais tout faire pour que ça arrive.»
Sa fille Alexane a maintenant 15 ans et est à même d'apprécier ses efforts. «On essaie de se garder en forme, on mange bien. Et même si la maladie reprend parfois le dessus, on regarde devant en se disant que chaque jour, chaque moment compte et est important.»
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LE Journal de Montreal