VIDEO. Maestro des vibrations : la symphonie silencieuse de David Le Gendre, chef d'orchestre atteint de surdité profonde
Sourd de naissance, David Le Gendre dirige 35 musiciens en ressentant la musique à travers les vibrations. À 32 ans, ce chef d’orchestre atypique transforme son handicap en force, créant un lien unique et profondément humain avec ses musiciens.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
À La Baguette, David Le Gendre dirige pas moins de 35 musiciens. Une prouesse pour ce chef d'orchestre débutant. Mais le défi est encore plus grand : David ne peut pas entendre la musique. Sourd sévère de naissance, il la ressent pourtant de tout son être."Je perçois plein de vibrations dans le corps. Elles arrivent parfois sous la forme de pulsations ou d’un coup, et parfois de façon plus nuancée. C’est ainsi que je ressens la musique." explique-t-il.
Une main plaquée contre le mur qui vibre, c’est sa façon bien à lui de percevoir toutes les subtilités des sons. Un instant suspendu entre le chef de 32 ans et les musiciens rencontrés à l’école de musique Syrinx de Poitiers (Vienne) : des plus jeunes aux plus anciens, des plus expérimentés aux novices, des classiques aux rocks.
Ultra-concentré, David scrute chaque musicien, chaque position d’instrument, au point de savoir lorsqu’un coup d’archet ne lui convient pas. Ce lien entre chef d’orchestre et musiciens est unique :"Je recherche avant tout le lien humain, cette force de m’adapter à eux et eux de s’adapter à moi. J’essaie d’apporter cette cohérence, cette cohésion, ce magnétisme entre nous." confie le jeune homme.
La musique a toujours fait partie de sa vie malgré son handicap. Un peu de percussions tout petit, une guitare grattée enfant. À 17 ans, sa mère lui offre un piano. La révélation. Même sans entendre les notes, il joue et compose :"Quand je touche cette note, je ressens quelque chose de plaisant. Celle-là de la tristesse. J’ai tout un imaginaire, comme une pluie battante, et des gouttes qui tombent sur les différentes touches du piano."
Depuis 15 ans, une complicité fidèle l’unit à son professeur de piano, Julien Querinaud :"Voilà 25 ans que je donne des cours. J’ai dû voir des centaines de personnes, mais je me souviendrai de David. Parce qu’il est incroyable. Parce que le pari est réussi."
David compose seul, mais travaille la direction d’orchestre avec Stéphane Bonneau, l’âme de l’école Syrinx. Comme toujours, il lit sur les lèvres et multiplie les astuces pour percevoir la musique : un pied contre la pique du violoncelle, une main posée sur l’instrument, et même un ballon pour capter les vibrations."J’ai fait l’expérience de plusieurs chefs d’orchestre qui dirigeaient mécaniquement très bien, mais qui ne me donnaient pas envie de me surpasser. Et David, quand il fait ses gestes, il y a toujours un supplément d’âme qui fait que tout le monde y est sensible et chacun est touché au plus profond de lui." confie Stéphane Bonneau.
La reconnaissance est arrivée en juin dernier : à l’occasion de la fête de la musique, l’Élysée a invité David pour saluer son parcours exemplaire. L’équipe de l’école Syrinx a immortalisé son jeune chef dans la cour d’honneur du palais.
David rêve désormais de devenir chef d’orchestre professionnel. En attendant, il continue de partager sa passion.
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