Le géant des effets spéciaux Technicolor au bord de la faillite
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Le groupe Technicolor qui emploie quelque 10 000 salariés dans le monde traverse une grave crise financière au point de devoir sans doute, a-t-il annoncé à ses salariés américains vendredi 21 février, cesser certaines de ses activités aux Etats-Unis. Les sociétés spécialisées dans l’animation et les effets spéciaux The Mill et Mikros Animation sont dans la tourmente. «Malgré des efforts considérables – notamment des initiatives de restructuration, des discussions avec des investisseurs potentiels et l’exploration d’opportunités d’acquisition –, nous n’avons pas été en mesure de trouver une voie viable pour l’avenir», écrit la directrice générale du groupe, Caroline Parot, dans un mail interne ayant fuité.
Les entités françaises du groupe, basé à Paris, sont elles aussi menacées. Une procédure de redressement judiciaire est engagée au tribunal de commerce permettant la poursuite de l’activité, mais dans un contexte inquiétant. Le géant de l’animation a annoncé être entré lundi en procédure de faillite au Royaume-Uni, où ont été licenciés les 440 salariés de sa branche. «Nous sommes conscients qu’il s’agit d’un moment incroyablement difficile et nous sommes là pour vous soutenir de toutes les manières possibles», écrit encore Caroline Parot, expliquant notamment que les carnets de commandes s’amincissaient compte tenu de l’épidémie de Covid, puis de la longue grève des scénaristes et des comédiens à Hollywood. Ces difficultés peuvent paraître d’autant plus surprenantes que MPC, filiale de The Mill basée à Londres, a enchaîné les contrats sur les gros films comme Top Gun : Maverick, Napoléon, Mufasa : le Roi lion, Dune… Mais c’est toute l’architecture du groupe aux activités dispatchées entre Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, France et Inde qui vacille aujourd’hui.
Il s’agit d’un nouveau chapitre d’une histoire industrielle jalonnée de déconvenues, de pertes massives et de plans sociaux. Longue histoire puisqu’elle commence en 2001 par la décision de celui qui deviendra commissaire européen, Thierry Breton, à l’époque PDG du groupe d’électronique français Thomson Multimédia, d’acquérir Technicolor, puis la décision du groupe, en proie à une dette abyssale, d’abandonner son nom au profit de celui de sa filiale Technicolor, en 2010. A nouveau au bord de la faillite, le groupe se scinde en deux en 2022 entre Vantiva (dédié aux stratégies haut débit) et la postproduction (cinéma, séries et publicités), toujours sous le nom de Technicolor.
Le secteur de l’animation et des effets spéciaux, outre les questions de marges affaiblies en raison des contrats qui ne tiennent pas toujours compte du nombre d’employés et d’heures consacrées à la réalisation et dans un univers fortement concurrentiel, va se prendre de plein fouet les innovations de l’intelligence artificielle qui devraient périmer rapidement certaines tâches encore réalisées par des dizaines d’individus penchés sur leur ordinateur à temps plein. Les difficultés de Technicolor s’inscrivent aussi dans ce grand chambardement à venir du secteur.
Libération